Décoration de nattes: Une fascination qui cache des difficultés

ALAKHBAR (Nouakchoot) - Assise à même le sol et exposée au soleil, Lalla Marieme, une quadragénaire, s'active, depuis plus de vingt ans, dans la décoration de nattes. Avec une dizaine d'autres femmes, elle occupe une petite ruelle s'ouvrant sur le "Marché capitale". Ce travail, Lalla l'a hérité de sa mère, et elle compte le transmettre, à son tour, à sa fille; une mignonne gamine de 5 ans qui regarde sa maman avec adoration.

"Les nattes proviennent de Rosso dans le sud mauritanien plus précisément de N'Diagou. Là-bas, elles sont confectionnées par d'autres femmes en utilisant des branchettes de plantes aquatiques qu'elles tissent à l'aide de files de cuire. Les nattes sont ensuite acheminées à Nouakchott où Lalla Marieme et compagnie s'occupent de la touche finale, celle magique, c'est-à-dire la décoration. Dans cette phase, différents motifs sont appliqués pour donner toutes sa beauté à ce tapis traditionnel qui, jadis, servait de repos et de prière, nous rappelle Lalla.

Aujourd'hui encore, les nattes sont très sollicitées surtout par les touristes. Les femmes les commandent également lors des cérémonies. Elles amènent aussi avec qu'elles à leur première arrivée au domicile conjugal, ajoute Lalla.

Puis Lalla de passer à l'exercice et commence à décorer une natte. L'opération prendra toute une semaine parce que, cette fois-ci, nous travaillons en groupe. Seule, j'aurais fait un mois pour la même tâche", dit-elle.

Et tout en continuant son explication, elle trempe une brosse à dents usée dans un pot de tomate rempli de teinture. La brosse, passée et repassés sur une natte, laisse d'extraordinaires figures géométriques: pyramides, carrés, cercles et autant d'autres formes qui "appâtent très souvent les touristes", raconte-elle en remuant son liquide.

« Nous avons une panoplie de couleurs décoratives, poursuit-elle. La taille, (5 mètre maximum) et la décoration font la différence des prix des nattes. Par exemple, la natte "Aljazeera", décorée en rouge assorti de files de cuirs, est la plus chère. Elle coûte jusqu'à 150.000 Ouguiyas, mais très sollicitée par les touristes venant d'Europe surtout de la Belgique, de la France et de l’Espagne. Même des marocains sont intéressés par le modèle. Par contre, la natte la moins chère c'est celle-ci (petite taille à faible décoration), elle ne coûte que 7000 Ouguiyas et sert à la prière", détaille Lalla.

En matière de gain, Lalla bénéficie de 2000 à 3000 Ouguiyas par natte vendue. "Ce revenu me permet d’assurer l’éducation de mes enfants et de les faire nourrir".

Nous savons que nous faisons du bon travail. La preuve: des passants, fascinés, nous félicitent chaque jour. Cependant nous sommes abandonnées à notre sort. L'espace que nous occupons est trop réduit. En plus, nous avons souvent mal à l'aise quand les propriétaires des sociétés et magasins riverains se sentent gênés par notre présence. Ce, sans compter la menace que constituent la circulation des voitures. Et même ceux, parmi nous, qui ont la chance de louer un une dépôt, souffrent de la cherté du la location (60 000 Ouguiyas). Nous espérons que l'Etat, les ONG et les bonnes volontés entendent notre cri de détresse" lance Lalla.