Date: 15.01.2025 Heure: 15:21 GMT
Ajouté le : 04.10.2014 13:02
Nouakchott: déception des commerçants à l'approche de l’Aïd el-Kebir (Reportage)
« Je ne tire pas plus de 200 UM sur un voile vendu»
Maïmouna a sa boutique au Marché de la capitale. Elle est au premier étage. Son amertume elle ne la cache pas : " J'ai commandé beaucoup de malhafas (voiles) de Doubaï. Je les ai payées très cher. Je ne vais pas les bazarder à moins de 20 000 UM. Malheureusement, les clients ne payent que des voiles de 2 000 à 10 000 UM".
Mohamed est lui un commerçant de robes chinoises. Il peut rester jusqu'à 22h sans vendre qu'une seule robe à 2000 ou à 3000 UM, nous raconte-t-il : "Les clients venaient en masse en période de fête. Mais, cette fois, ils se font très rares", constate-t-il.
Quant à Aicha, elle n'a pas de boutique. Ses voiles sont étalés par terre et sous le soleil. Et son souci c’est qu’elle a dû mal à récupérer les 600 UM qu’elle dépense par jour dans les frais de taxi pour venir au marché « Je vous jure que je ne tire pas plus de 200 UM sur un voile vendu ».
Ce commerçant Diallo s’emble connaître le choix des clients. Nous l’avons trouvé en train de discuter avec une acheteuse. « Les clients préfèrent les voiles dits "gaz" ou « Sender » parce qu'ils sont moins chers. Ils sont vendus entre 1800 et 2500 UM", explique-t-il. Sa cliente, Mona, dit être obligée de payer le gaz pour ses enfants en raison de "contraintes financières".
« Je n'ai pas d'argent à gaspiller»
Non loin, il y a Maty. Cette visiteuse du marché, accompagnée de sa fille, dit : " En tout cas moi, je n'ai pas d'argent à gaspiller. Je dois me payer moi-même une robe et d’autres pour mes enfants sans oublier les chaussures qui partent avec".
Nous avançons dans une autre boutique. Nous y trouvons Mariam, une mère de famille qui avait l'habitude d’acheter des robes de 15 milles UM à ses enfants. C’est dans un sourire timide qu’elle dit que ce ne sera pas le cas cette année : " Je n'ai ni le courage ni les moyens. Je vais juste leur payer des robes de 3500 UM venant de Doubaï ou du Maroc".
« J'ai d'autres priorités…Je dois acheter un mouton »
Limam qui portait toujours du bazin Ezbi (très convoité en Mauritanie) doit revoir ces goûts: "Ecoute, j'ai d'autres priorités que de payer un boubou cher. Je dois acheter un mouton et habiller ma femme et mes enfants ». Abdou, célibataire de son état, veut toujours s'habiller chic en période de fête. Mais comment faire? " C'est simple, nous dit-il. Au lieu de 10 m de bazin comme d'habitude, je vais prendre 8 mètres et le reliquat je vais l'ajouter au prix de la chemise et des chaussures ».
Du moins cher, mais attention !
Pourtant dans un autre coin du marché, certains commerçants arrivent à drainer du monde. "Allhamdoulliah. Je draine beaucoup de clients. J’ai compris leur situation financière. Du coup, j’ai diminué mes prix. Je vends par exemple ces chaussures Spadri à moins de 4000 UM », raconte Cheikh. Sauf que ce vendeur propose aux acheteurs des chaussures de mauvaise qualité.
Et parmi les clients il ne manque pas ceux qui disent comprendre la stratégie des commerçants. « Ils (les commerçants) veulent faire penser qu'ils ont du nouveau pour qu'on paye plus cher. Mais c'est faux. Moi en tout cas, je ne vais pas leur augmenter une seule ouguiya. Je payerai en fonction de mes moyens", lance Fatimetou.
Et pour cette mère de famille, " il n'y a pas de nouveauté chez ces commerçants. Tout ce qu'ils font c'est de coller de nouvelles étiquettes ou des noms de vedettes aux anciens produits pour appâter surtout les enfants ».